L’addiction Fortnite est un sujet qui fait couler beaucoup d’encre. Avec 350 millions d’utilisateurs, le jeu est un véritable succès. Pour autant, tout n’est pas idyllique. Alors Addict ou pas Addict ? 

Au Québec, des parents de jeunes enfants ont saisi la justice en raison de son caractère addictif. Et pour cause, de nouvelles mises à jour et de nouveaux défis sont constamment ajoutés, ce qui donne envie de rester, encore et encore. Autre facteur à noter : le jeu est conçu de manière à ce qu’il y ait toujours d’autres joueurs en plein combat. Quitter le jeu revient à les abandonner ou à ne pas voir la fin de la partie. Inconcevable pour nos jeunes geeks !

Qu’est-ce que Fortnite ?

Pourquoi tous nos jeunes en sont-ils accros ?

Peut-on mettre en cause une volonté d’Epic Game, les développeurs du jeu vidéo ?

On revient sur un des jeux les plus marquants des années 2020.

Addiction Fortnite : 3,2 milliards d’heures de jeu pour 350 millions de joueurs…

Tout d’abord, il convient de faire un petit rappel pour nos lecteurs et lectrices néophytes.

Qu’est-ce que Fortnite ?

En fait, c’est un jeu adaptable aussi bien sur PS4 que sur ordinateur, Switch ou Smartphone, et dont nos ados sont complètement fous. Le logiciel a été créé en 2017. Il consiste à s’allier avec d’autres joueurs (on peut aussi rester seul), et à battre les équipes adverses pour survivre. L’avatar détruit et construit son environnement, à l’aide d’une pioche. À d’autres moments, il utilise ses armes pour tuer les autres joueurs. C’est le mode Battle Royale.

Grâce aux deux versions du jeu, l’addiction Fortnite a de beaux jours devant elle

Initialement, il y avait une autre version Save The World, qui consistait à s’allier pour vaincre des zombies. Depuis 2017, où le mode Battle Royale a été intégré, il y a constamment de nouvelles mises à jour, améliorations et nouvelles versions. Les idoles des jeunes et leurs références culturelles servent ouvertement d’inspiration : on pense notamment à Dragon Ball Z, pensé par Vysena Studio, qui reproduit la maison de Goku et autres lieux emblématiques du manga.

La communautaé de Fortnite a eu le plaisir de retrouver Aya Nakamura, la chanteuse de Pookie ou Djadja et plus récemment, The Kid Laroi, le rappeur australien qui fait actuellement fureur.

PEGI12… Une mesure de précaution qui paraît insuffisante

De base, le jeu est classé T, initiale de Teen : il est réservé aux adolescents de plus de 13 ans. En France, on le dit PEGI 12, donc interdit aux moins de 12 ans. Il est parfaitement déconseillé par les fabriquants eux-mêmes de laisser de trop jeunes enfants jouer.

Pourquoi cette précaution ? On parle d’une violence trop importante. Les jeux sont certes, concentrés autour des battles et combats divers, mais il n’y a pas de sang ni de scènes choquantes comme on peut en retrouver dans d’autres jeux vidéos. On remarque aussi, une atmosphère, une « déco » moins sombre. Des couleurs vives et chatoyantes, de la clarté qui distingue clairement le jeu des autres de sa catégorie. On s’entretue certes, mais c’est moins glauque. Du coup, c’est pire ? Bien sûr que non : c’est fun !

Il semblerait donc que le problème vienne d’ailleurs. Une volonté des développeurs ? On regarde de plus près.

Jeu addictif Fortnite : on décrypte ce qui pose problème

Vous l’avez sûrement remarqué si vous avez un adolescent à la maison. Fortnite passe avant le repas, les devoirs, la vie de famille et surtout… impossible de le faire décrocher quand il a le nez dedans. Quelles sont les astuces des fabriquants pour les rendre si accros ?

Une action en justice pour des jeux plus éthiques ?

Nous en parlions précédemment : une action en justice a été démarrée au Canada. Sylvain Lussier, juge à la Cour Supérieure du Québec autorise cette action, qui regroupe plusieurs collectifs. Ces derniers argumentent que l’OMS a classé les jeux vidéos comme un dépendance depuis 2018. Ils avancent l’idée que des psychologues spécialisés auraient pensé le jeu pour le rendre encore plus addictif. Qu’en est-il en réalité ?

Intéressons-nous premièrement aux symptômes d’une telle addiction.

Fortnite addiction et symptômes : où en est-on exactement ?

Qu’est-ce qu’une addiction aux jeux vidéos ? L’OMS et le DSM (le document qui regroupe et définit les maladies psychiatriques) la décrivent comme suit : « Une perte de contrôle de sources de gratification, ne se limitant pas seulement aux substances, et entraînant des dommages à de multiples niveaux de fonctionnement. »

Le constat des parents de joueurs

Les parents et les médecins tirent le signal d’alarme. Les enfants présentent des troubles du comportement, des troubles du sommeil, des douleurs aux cervicales, mais ce n’est pas tout. On constate aussi chez les plus jeunes, des troubles de la concentration et de l’agitation.

La liste est longue. Certains gamins se réveillent tout de même au milieu de la nuit pour reprendre leur partie et négligent leur hygiène corporelle ! Quand ils ne mangent pas directement devant la console, une main sur le burger, l’autre sur la manette. On caricature, mais admettez-le, on n’est pas loin !

N’entendez-vous pas, sortir de la chambre de votre adolescent, des cris qui ne semblent même pas émaner d’un être humain ? Bienvenue au cœur des conséquences d’une attention prolongée fixée sur Fortnite.

Un des problèmes majeurs de Fortnite : la possibilité d’acheter des accessoires et des danses avec de l’argent réel

L’argent réel permet d’acheter de l’argent virtuel (il faut suivre !) et ensuite, d’acquérir de nouvelles armes. L’avatar est ainsi plus puissant et peut ainsi défoncer plus rapidement ses adversaires. On peut aussi acheter du design, des motifs pour décorer les armes. Des dépenses non essentielles pensez-vous… Eh bien elles le sont pour ces ados qui, bien souvent, n’ont jamais travaillé et ne maitrisent pas toujours la valeur de l’argent.

 

Fortnite Kid Laroi
Comment résister ? Après Aya Nakamura, c’est au tour de The Kid Laroi de se produire sur Fortnite !
L’incontournable rappeur, chanteur et parolier australien intègre la série Icônes de Fortnite afin de faire résonner ses tubes dans une nouvelle expérience interactive. Depuis le 28 janvier, l’île des Rêves d’aventure de The Kid LAROI ouvre ses portes pour offrir une expérience musicale immersive retraçant l’histoire de l’artiste de ses débuts modestes à sa célébrité planétaire.

Ce qu’il se passe dans la tête de nos jeunes

Une solution pour cela : convaincre les parents de prêter la carte bancaire… ou la subtiliser. Ou rester frustré, chose qui, avouons-le, n’est pas le fort des 12 – 24 ans. Le vôtre a de la chance : il a sa propre carte et son salaire d’apprenti qui tombe tous les mois. Vous voilà sauvés !

Une efficacité redoutable, corrélée par des chiffres

LendEdu (un marché en ligne pour une variété de produits financiers) précisait dans une étude menée sur 1 000 utilisateurs, que 69% y dépensaient de l’argent réel… La stratégie d’Epic Games est donc payante… au sens propre, comme au figuré. Candy Crush n’a qu’à bien se tenir !

Addiction Fortnite : nos recommandations

Face à ce constat, nous ne pouvons que vous recommander de faire preuve de la plus grande vigilance, mais surtout, d’être ferme avec vos adolescents. Le décrochage scolaire n’est jamais loin quand on parle de maladies telles que l’addiction.

Comment les développeurs de Fortnite ont-ils fait ? Quelle sont leurs stratégies ? On fait le point.

Addiction Fortnite : quels sont les mécanismes qui rendent vos enfants accros ?

C’est la psychologue Célia Hodent qui est à l’origine de Fortnite. Le grand public la soupçonne d’avoir étudié la neurobiologie du cerveau et les mécanismes corticaux pour augmenter le temps de présence en ligne, et donc, le succès du jeu.

Cette professionnelle, auparavant embauchée chez Ubisoft, est aussi l’autrice du livre The Game Brain. Elle connaît donc parfaitement son sujet : l’hypothèse d’un paramétrage du jeu de manière à ce qu’il soit plus addictif est donc tout à fait plausible.

Allons plus loin dans nos recherches.

Apparemment, le fait que les joueurs reçoivent une récompense rapidement après avoir tué un adversaire (des XP, qui sont en fait des points qui vous permettent d’accéder au niveau supérieur). Cette gratification est très importante.

Addiction Fortnite : quel lien avec le réflexe de Pavlov ?

Il semblerait que cela titille le réflexe de Pavlov. Qu’est-ce que le réflexe de Pavlov ? Prenons un exemple pour mieux comprendre. Vous avez un jeune chien qu’il faut éduquer. Vous tenez à lui apprendre les règles de base sans violence. Pour cela, vous utilisez des friandises. Chaque fois qu’il s’asseoit, vous lui en donnez une.

A force, il se mettra assis et commencera à saliver dès qu’il entendra la boîte de friandise s’ouvrir ou (dans l’expérience de Pavlov, la cloche annonciatrice de la récompense). Ce signal lui donne l’eau à la bouche et le fait frétiller de joie. C’est le réflexe de Pavlov. Le cerveau réagit à une récompense à venir. Il en va de même pour les enfants et leurs fameux XP.

Prenez garde à l'addiction Fortnite !
Parents, soyez vigilants à l’addiction Fortnite : ça n’arrive pas qu’aux autres !

Fortnite addiction : une affaire d’hormones ?

Les chercheurs se sont aussi intéressés à la production d’hormones. Il semblerait qu’en jouant à ce jeu, les gamins libèrent un taux élevé d’adrénaline, de sérotonine, de dopamine et de noradrénaline. Quelles sont les fonctions de ces quatre hormones ?

L’adrénaline

La première, l’adrénaline, est causée par la peur et l’envie de prendre des risques. Bon nombre de joueurs de casino y sont dépendants. Ils ne vivent que pour la sensation, pour les émotions que déclenche l’activation du manche.

Addiction Fortnite : la sérotonine en cause ?

La sérotonine est une hormone de l’action. Dans un jeu comme Fortnite, il faut prendre des décisions « graves » et rapides. Par « graves », nous entendons des décisions qui peuvent mener le groupe à l’échec ou tuer tout le monde. On ne rigole pas avec ça quand on a 13 ans. Lorsque la libération de cette hormone est détraquée, on observe un moins bon contrôle de son comportement et de ses émotions.

La dopamine

La dopamine, c’est l’hormone du plaisir. Son taux est anormalement élevé chez les drogués qui viennent de prendre leur dose. Elle chute dramatiquement lorsqu’ils sont en manque, ce qui amène les états physiques et psychologiques que l’on connaît. Il en va de même avec les jeux vidéos.

La fonction de la noradrénaline dans l’addiction Fortnite

Enfin, la noradrénaline décuple les émotions et les sentiments. Lorsqu’on en produit trop, ces derniers deviennent ingérables. En découlent des troubles du comportement importants. C’est aussi grâce à cette hormone que nous sommes capables d’enchaîner des tâches répétitives et ennuyeuses, à l’infini.

Addiction Fortnite : le marketing fait son entrée

Que serait ce jeu sans toute l’action marketing mise en place ? Les jeunes ont en effet la possibilité d’acheter des vêtements à leur avatar (des skins). Ils ont pour cela de nombreuses réductions et promotions qui leur donnent l’impression de faire une bonne affaire. Ça ne vous rappelle rien ? Les experts du marketing utilisent les mêmes stratégies. Elles fonctionnennt sur les adultes, alors que dire des enfants ?!

Des promotions temporaires pour un jeu quotidien

Certaines promotions ne sont accessibles qu’à des dates précises…  Comment y remédier ? En y venant tous les jours bien sûr ! Ainsi, vous êtes certain de ne rien rater !

Le profilage de la cible (vos enfants)

Toujours dans le registre du marketing, on remarque à travers les théories de Richard Bartle, en place tout de même depuis les années 1970. Il détermine qu’il y a quatre profils différents de joueurs :

  • Les achievers, qui veulent explorer le jeu et le contrôler,
  • Les explorers, qui attendent de nouveaux décors, de nouveaux défis,
  • Le killer, qui tient à gagner et tuer tous les autres joueurs,
  • Le sociolite, qui a envie de jouer et de vivre une expérience de jeu particulière.

Regardez bien : Fortnite a réussi le tour de force de satisfaire ces 4 profils… Difficile de croire à un hasard.

Note : l’un des piliers de la vente consiste à bien connaître sa cible afin de lui proposer une offre qui correspond parfaitement à ses attentes… Et de l’inciter / l’obliger à acheter, alors qu’elle ne l’avait initialement pas décidé. L’objectif du jeu n’est donc pas de jouer et divertir, mais bel et bien de vendre un maximum d’options dont on se passerait bien !

La décision du juge

Les documents mis en avant lors de l’action collective menée au Québec donnent l’exemple de deux enfants : le premier a joué, selon le procès, environ 7 781 heures en deux ans… Le second totalisait 59 954 minutes de présence sur le logicieL… Que cette addictivité soit volontaire ou non, il est évident qu’un développement plus éthique et moins basé sur le résultat est à penser. Oui, les jeux gratuits doivent trouver une manière d’être rentables… mais pas au détriment de la santé de nos enfants !

Le juge estime que malgré l’absence de lien de causalité entre le diagnostic de cyberdépendance fait par le médecin sur les enfants et la volonté des développeurs de Fortnite de les rendre effectivement dépendants, l’accusation des parents n’est ni « frivole » et ni « infondée ». Résultat : une amende de 520 millions d’euros pour son éditeur. Le juge estimait en effet que toutes les mesures n’avaient pas été prises pour protéger les joueurs mineurs !

Promis, on demande à Epic Games son point de vue sur la question, sa réaction face à de telles décisions de justice et signaux d’alarme et pourquoi pas ses conseils pour bien vivre le jeu… Affaire à suivre !