Qu’est-ce qui se cache derrière le 3919 ? Rebellissime rencontre les piliers de cette fédération à l’occasion de ses 30 ans

Le 10 mars 2023, on fêtait les 30 ans du 3919. Qu’est-ce qui se cache derrière ce numéro entièrement gratuit ?

À la rédaction, on se posait la question. Nous nous rappelions une époque où le 3919 n’était accessible qu’aux heures de bureau. Une poignée de professionnels se relayaient. Ils tentaient d’apporter des solutions efficaces et concrètes à des situations très compliquées. 

Nous verrons que tout cela a évolué. 

Qui sont les professionnels du 3919 ?

Quelle est leur action ?

En quoi sont-ils efficaces ?

Nous avons interviewé Aurore Lechat, cheffe du service du 3919, Najat Vallaud-Belkacem, femme politique, avons parcouru cette exposition très touchante, où les portraits shootés par le photographe Marc Melki étaient exposés. Découvrez les moments forts et interventions clés de cette journée anniversaire des 30 ans du 3919.

Qu’est-ce qui se cache derrière le 3919 : un combat vieux de 31 ans exactement

Une organisatrice nous confie qu’en réalité, le trentième anniversaire devait se dérouler l’an dernier, en 2022. Le projet a pris du retard, mais ce n’est pas grave : nous sommes là.

La lutte contre les violences faites aux femmes en France pourrait trouver son point de départ en janvier 1977. Ce mois a en effet vu naître la première coordination des groupes de femmes. Ainsi, l’avant-garde du féminisme pouvait commencer à se coordonner et à venir en aide aux victimes de manière plus efficace. 

Six collectifs existent alors, dont SOS Femmes Alternatives Alsace, SOS Femmes 13, une association de Belfort et une autre de Loire-Atlantique. En 1981, on observe la création de Mouvement Solidarité Femmes – Fédération Nationale. En 1992, ce ne sont pas moins de 35 associations actives sur le territoire. Toutes ont le plaisir d’inaugurer le 3919. Ce numéro est géré par la Fédération Nationale Solidarité Femmes et soutenu par le Secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes… Le nombre d’associations passe à 64 en 2010, puis à 248 en 2023… On peut s’inquiéter de voir ainsi les chiffres grimper. On peut aussi se féliciter que la parole des victimes se libère enfin et que les violences soient reconnues. 

En bref, les professionnels ont tissé une toile qui leur permet aujourd’hui de traiter les situations de violences partout en France. 73 associations accueillent, accompagnent et hébergent les femmes victimes de violences et leurs enfants

Le 3919 en chiffres

Au cours de cet événement, nous apprenons par exemple que 45 000 appels ont été passés à ce numéro vert pendant le confinement, soit entre le 16 mars et le 10 mai 2020. Les chiffres ont triplé, selon Élisabeth Moiron-Braud, magistrate, secrétaire générale de la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF) . Le tchat a été d’un précieux secours, car ne nécessitant pas de parler. Les points de parole d’urgence comme les pharmacies ont également été des leviers qu’il faudrait penser à généraliser à l’avenir.  

En 2020, ce ne sont pas moins de 165 000 appels reçus. Cela représente une hausse de 70% par rapport à l’année précédente. Cela ne s’explique pas forcément par une augmentation des violences, mais par une meilleure connaissance du dispositif, et par une alerte plus précoce. 

Au 3919, on constate que 69% des victimes sont des femmes, et que de plus en plus, on signale les agressions sexuelles. 

Nous nous demandions, en vue d’un prochain article, si les services du 3919 étaient les mêmes sur tout le territoire. En effet, nous avons constaté au cours de nos enquêtes précédentes que les inégalités de prise en charge étaient causées par une répartition inégale des moyens, des formations. Aurore Lechat répond à nos questions à l’occasion de cet évènement. Le numéro est national, donc en l’appelant, vous tomberez sur l’une des 50 écoutantes salariées. Tout n’est pour autant pas parfait. « Certaines femmes et victimes d’Outre-Mer ne le contactent pas parce qu’aucune écoutante ne parle leur langue. Mettre en place des services plus accessible est en train de devenir, un pilier de la lutte contre les violences intrafamiliales. C’est ce qu’explique ce 10 mars Marie-charlotte Garin, députée du Rhône, lors des conférences de cette journée anniversaire. 

Qu’est-ce qui se cache derrière le 3919 et quelle est son efficacité ?

7 femmes et 6 hommes, ainsi que 3 enfants ont perdu la vie pendant le confinement. La cause ? La violence d’un conjoint, d’une conjointe, que l’isolement et la privation de liberté a rendu comme fou. 

L’efficacité du dispositif a été prouvée. Il est désormais accessible 24h/24, à part le 8 mai, les 25 décembre et 1e janvier. L’équipe ne souhaite qu’une chose, selon Mme Aurore Lechat, la cheffe de service du 3919 : voir ce numéro disparaitre ! En attendant que les violences cessent, les professionnels ont besoin de fonds, mais aussi de se faire connaître auprès des victimes et des intervenants (avocats, police, gendarme…, encore trop peu formés). Pour autant, le 3919 n’est pas un numéro d’urgence. Il est nécessaire de se mettre d’abord en relative sécurité, grâce à la police ou de la gendarmerie (composez le 17).

Les écoutants vont tout d’abord, en 3 minutes, estimer la gravité de la situation, et, comme aux urgences, vous aiguiller vers un autre professionnel qui vous accordera davantage de temps. Il réfléchira à l’association la plus pertinente ou à un hébergement d’urgence, qui permette à la victime et à ses enfants de souffler un peu. 

À noter : il existe un système dédié aux personnes sourdes ou malentendantes : c’est Rogervoice. Téléchargez-le sur votre smartphone et contactez le tchat du 3919 par ce biais, totalement gratuit. 

En ce qui concerne l’efficacité, les chiffres parlent d’eux-mêmes : on compte 102 féminicides en 2020. L’année 2019 avait pour sa part, enregistré 146 féminicides.

Qu’est-ce qui se cache derrière le 3919 ? Peut-être tout simplement des humains, des psychologues, journalistes, ou diverses professions, qui mettent leur expérience et leurs domaines d’expertise au service des plus vulnérables.

Nous avons apprécié les interventions de Cindy Bruna, mannequin ambassadrice de la Fédération Nationale Solidarité Femmes et L’Oréal, de Pied-Yves Ginet photo-journaliste co-fondateur du magazine et de l’association Femmes d’Ici et d’Ailleurs, Marie-Pierre Rixain députée de l’Essonne ou encore Marie-Charlotte Garin députée du Rhône. De belles interview en perspective !