Depuis quelques mois, les drames se succèdent dans le département du Val-d’Oise, et plus particulièrement à Garges-lès-Gonesse. Voici un appel aux pouvoirs publics qui doivent réagir, appuyés des acteurs de grande proximité, pour reconstruire des parcours de réussite et mettre fin à cette série noire qui n’illustre que la détresse sociale présente dans nos quartiers.
Tribune libre à Hind Ayadi
Amine, Kiki, Alassane, Giovanni, Brandon...
Ces noms, ce sont ceux de garçons, souvent jeunes, intelligents,
serviables. Les noms de garçons que la rue aura rattrapés, que l’espoir aura quitté. Ce sont les noms de nos frères, de nos fils, de nos neveux, de nos voisins. Ce sont les noms de nos amis, parfois de nos pères. Ce sont les noms de l’abandon des institutions et d’une partie des dirigeants, de la désertification sociale et de l’inaction politique. Ils avaient des ambitions, des objectifs, certainement des rêves. Mais le béton assassine. Nos dirigeants, encore aujourd’hui, n’ont l’air de vouloir se réveiller qu’après les coups de feu tirés ou l’écho des sirènes traînées par les camions d’urgence, constamment trop tard.
Nous, acteurs associatifs de grande proximité...
… dans des quartiers dont trop peu en connaissent les réalités autrement que sous le prisme de reportages controversés ou a coup d’opportunistes polémiques.
Nous souhaitons alerter le personnel politique qui s’apprête à entamer une nouvelle séquence à l’issue des élections présidentielles et législatives. Nous souhaitons vous dire combien il nous est insupportable de voir nos jeunes s’entretuer, nos mères pleurer, sans que des politiques publiques dédiées ne soient décidées, vous dire que nous ne pouvons supporter le poids de l’intégralité des conséquences des défaillances systémiques sur les questions d’éducation, d’insertion, d’emploi. Nous souhaitons vous dire que les prochaines années doivent laisser entrevoir des mesures ambitieuses.
Nous connaissons nos réalités...
…nous savons à quel point tout le monde ne naît pas sous la même étoile. Malgré leurs efforts, nos parents ne peuvent à eux seuls pleinement accompagner leurs enfants, dans un monde qui leur est déjà hostile. Le sacrifice de leur vie ne doit pas être vain.
Pour nous, le déterminisme social n’est pas qu’un concept.
La prison à ciel ouvert n’est pas qu’une image. C’est de la souffrance, qui souvent se transforme en violence, parfois aux issues dramatiques que nous voyons au quotidien. C’est le sentiment d’injustice que nous observons, quand certains de nos jeunes sont envoyés en prison pour défaut de permis ou outrage, dans un système qui pense que l’acharnement juridique et l’incarcération aura plus d’impact positif que le suivi et la solution solution sociale.
Mesdames et Messieurs les candidats, les larmes ont trop coulé, le sang a trop coulé.
Bien que nos guerres quotidiennes se déroulent loin de l’Elysée, nous, acteurs associatifs de grande proximité, nous méritons l’écoute des dirigeants de ce pays. Nous le méritons car maintien de l’état, dans certaines situations, c’est nous.
Nous sommes les réparateurs de rêves brisés...
…les spectateurs de drames, les accompagnateurs de reconstructions individuelles, les réceptionnistes des colères mais aussi les assistants de réussites, les acteurs de la solidarité. Il ne faut plus que ces réussites ne soient que des exceptions. Nous pouvons dire la vie des gens. Nous sommes celles et ceux qui, pendant la crise sanitaire sans précédent que nous avons connue, ont monté les marches de tous les immeubles pour faire les courses à nos anciens, quand des associations institutionnelles fermaient leurs portes, ont appelé toutes les mères isolées pour prendre de leurs nouvelles. Nous sommes celles et ceux qui nous sommes battus pour que nos plus jeunes puissent avoir un matériel scolaire et informatique adéquat, quand les autorités publiques ont manqué à leur devoir.
Lors des discussions parlementaires sur les différents sujets qui peuvent concerner les quartiers populaires, aucunes associations n’est consultée
…les acteurs de terrain sont méprisés. Les morts s’additionnent, et les annoncent politiques paraissent être la preuve que la prévention est aujourd’hui profondément défaillante. Les erreurs se succèdent et se ressemblent de la suppression d’emplois aidés, la frilosité à remettre en place la police de
proximité, la baisse des subventions et dotations. Tant de coups qui ne nous aident pas, mais ne nous démobiliseront en aucun cas. Nous ne pouvons cependant pas être les guichets uniques de la République.