Moussa Wagué, president d’une maison  de disque retenu au Mali

Moussa Wagué est le fondateur et président  de la multinationale Keyzit. Sa maison de disque accompagne les artistes dans la promotion et la distribution musicale. Suite à un différent juridique avec l’un d’entre eux, Sidiki Diabaté, l’homme d’affaires a été interpellé et incarcéré par 7 fois en tout à Bamako, au Mali. S’il est à l’heure actuelle sorti de cellule, il fait l’objet de pressions et ne peut pas quitter le territoire malien.


 

 

Déterminé, comme le prouve le post Facebook de Moussa Wagué. «Ils peuvent tuer le révolutionnaire mais pas la révolution… Ils peuvent bâillonner nos bouches mais jamais nos idées…Ils peuvent censurer l’expression mais pas la liberté… Ils peuvent tuer le résistant mais pas la résistance… Ils peuvent enchaîner nos mains mais jamais nos consciences… Ils peuvent assassiner le rebelle mais pas la rébellion »Merci pour vos soutiens. La vérité finira par éclater, la vérité seulement ! Je me demande si mes codétenus sont aussi « coupables »que moi… »

 

En prenant connaissance du communiqué de presse de Keyzit et des messages d’alerte et de soutien sur les réseaux sociaux, Rebellissime s’interroge sur les tenants et les aboutissants de l’affaire opposant Moussa Wagué à travers sa société Keyzit en litige avec Toumani et Sidiki Diabaté.  Comment a-t-on pu en arriver là ? Un producteur privé de sa liberté d’aller et venir pour une histoire de contrat. La musique sonne faux. Derrière le talent et les titres qui ravissent nos oreilles, l’envers du décor cache de bien vilaines pratiques. Alors que le Mali est en pleines élections, un ressortissant français y est bloqué, sans comprendre vraiment de quoi on l’accuse. Vu d’ici, il apparaît qu’on essaie d’obliger Keyzit à renoncer à sa procédure contre Sidiki Diabaté. Oui, ça sent l’illégalité et l’abus de pouvoir. Le non-droit fait peur. Ses avocats se démènent sur place pour comprendre comment cette affaire a pu prendre de telles proportions. Pour mieux comprendre et informer le public sur ce qui se passe, Rebellissime reste en relation et a interviewé Maître Hosni Maati, l’avocat de Moussa Wagué et Keyzit.

 

Sidiki Diabaté

Que s’est-il passé ? 

Tout commence avec une saisie conservatoire ordonnée par la justice française à la demande de Keyzit de presque un demi-million d’euros sur les comptes SACEM de l’artiste Sidiki Diabaté. Ce dernier est le fils de Toumani Diabaté, considéré comme l’un des plus grands joueurs de Kora. Le jeune musicien, compositeur, instrumentaliste et chanteur africain Mamadou Sidiki Diabaté est célèbre à travers le monde. On a pu notamment l’entendre dans l’album de M, Lamomali ou encore en featuring avec Black M, Niska, Booba, 4 Keus… En contrat avec Keyzit, sa maison de disque lui reproche à plusieurs reprises ses manquements au respect de son contrat. La justice française donne raison à Keyzit en bloquant les comptes SACEM du petit prince de la Kora. D’un litige contractuel, comment peut-on arriver à une arrestation et à l’impossibilité de quitter le Mali pour Moussa Wagué ? A presque quarante ans, l’entrepreneur français se retrouve dans une situation plus que préoccupante. Alors que l’on ne peut que saluer sa démarche entrepreunariale qui vise à faire rayonner et à protéger des artistes africains ( Sidiki Diabaté, Adiouza, Mohamed Diaby, Memo All Star, Tal B, Gaspi, Young Pô, Viebou Loup, Pito Qualité, Ben Aflow, Lil Boula, Force One, Istorik, Lago Paulin, Tonton Zela, Vitale, Ava Diez, DJ Moasco, Doriane, Enemix, Ezaie, Franklon, Manou Jolie, Nestor David) et français (Monsieur Nov, Gen Renard, Tito Prince, Jewel) à travers le monde, on est aussi légitime à s’interroger et s’inquiéter d’un monde où l’on peut faire pression sur un individu, jusqu’à le priver de sa liberté de circuler pour des histoires de gros sous. A l’heure actuelle, les propos recueillis auprès de son avocat, Maître Hosni Maati,  montrent à quel point son  statut au Mali est incertain.

Maître Hosni Maati

Rebellissime : Comment va Moussa Wagué ? 

Maître Maati : « Moussa Wagué est tombé malade, il a attrapé le paludisme, mais il va mieux. Il pense surtout à ses enfants, sa famille. Mardi 31 juillet, il a tenté de quitter le territoire. Malheureusement il a été arrêté et placé en garde à vue alors que nos confrères maliens lui avaient expliqué qu’il était libre de ses mouvements. La seule contrainte étant qu’il doit se présenter  au Tribunal à la convocation du parquet. Alors que l’affaire relève du civil il est traité comme un voyou. C’est purement et simplement scandaleux ! Face à la situation, Moussa Wagué reste déterminé et surtout il souhaite comprendre quel est son statut pénal ».

Rebellissime : Quel est le problème entre Keyzit et Sidiki Diabaté ? 

Maître Maati : « La justice française a déjà ordonné des saisies à hauteur de 450 000 euros sur les comptes de droits d’auteur de la SACEM de Sidiki Diabaté. Ce dernier a totalement le droit de contester cette saisie conservatoire, mais pour cela il faut qu’il saisisse la justice française. On verra ce que décide la justice française, qui a autorité pour ses contrats le liant à Keyzit. Nous ne sommes pas contre une résolution amiable du différent entre Keyzit et Sidiki et Toumani Diabaté, encore faut-il que ses droits soient respectés. Encore une fois, Keyzit n’est pas contre le fait de signer un accord, mais pas dans ces conditions. Rien ne nous empêche de continuer à négocier une fois Moussa Wagué sorti du territoire. On ne peut pas accepter qu’un citoyen français, à la tête d’une multinationale, soit mis sous pression pour revoir les termes d’un contrat ! De telles pratiques invalident même tout accord ou transaction signé sous la contrainte. Il y aurait manifestement un vice de consentement ».

Rebellissime : Pourquoi Moussa Wagué est-il retenu au Mali ? 

Maître Maati : « Rien n’a été notifié à Mousa Wagué. Il n’y a pas de procès verbal le plaçant sous contrôle judiciaire, justifiant qu’il reste au Mali. Officiellement rien si ce n’est qu’il n’a pas signé de protocole transactionnel avec les consorts Toumani et Sidiki Diabaté. Mais cela n’est pas une raison suffisante. Le dernier rendez-vous a été reporté en raison de la grève des magistrats qui a été prolongée jusqu’au 7 août 2018« .

Rebellissime : Quel est le statut de Moussa Wagué au Mali ?

Maître Maati :  » Afin d’obtenir des précisions sur son statut pénal, j’ai écrit à maître Keita, l’avocat de Sidibi Diabaté, en lui demandant de préciser les motifs de la plainte. Cela permettrait en effet d’établir quel est le statut  de Moussa Wagué. Mais je n’ai toujours pas reçu de réponse. Moussa Wagué a des avocats qui le représentent et cette affaire est encore une fois certainement civile mais absolument pas pénale ».

Rebellissime : Pourquoi ce flou juridique ? 

Maître Maati : « Le problème c’est que nous ne connaissons pas le fondement de la plainte. Elle  a été déposée, mais nous ne l’avons jamais vue, malgré mes demandes d’en recevoir la copie. A priori, il s’agit d’une plainte pour escroquerie et abus de confiance. Nous ne remettons pas en cause le droit incontestable de Sidiki Diabaté de porter plainte. Mais il faut bien comprendre, qu’à titre personnel, Moussa Wagué n’a aucune relation avec Sidiki Diabaté. C’est son entreprise Keyzit qui est en relation contractuelle avec l’artiste. Sans copie de la plainte, nous n’avons pas de certitude absolue quant à son statut pénal. Est-il sous contrôle judiciaire ? Nous ne savons rien à l’heure actuelle ».

Rebellissime : Et la présomption d’innocence ? 

Maître Maati : « Aucune enquête n’a permis d’établir la véracité des faits reprochés à Moussa Wagué, et pourtant ce dernier est d’ores et déjà empêché de sortir du territoire. Cela sans aucun fondement à notre connaissance. On ne lui a pas notifié de contrôle judiciaire. On lui a simplement dit « vous n’avez pas le droit de sortir du territoire ».

Rebellissime : Qu’attendez-vous des autorités maliennes et françaises ? 

Maître Maati : « Nous attendons que le Parquet de Bamako oriente cette affaire comme elle doit l’être à savoir un classement sans suite. D’autres part, les autorités judiciaires maliennes ont obligation, dès lors qu’un ressortissant français est soumis à un tel traitement, d’informer l’ambassade de France. En effet son passeport français lui a été confisqué une première fois avant de lui être rendu, suite à la publication d’un post sur Facebook. On lui a retiré une seconde fois mardi 31 juillet alors qu’il tentait de quitter le territoire. Moussa Wagué a également fait l’objet d’un mandat d’amené, il a été placé en garde à vue à deux reprises… L’ambassade de France est pour l’instant aux abonnés absents mais nous avons espoir que les choses évoluent de leur côté et que Moussa Wagué puisse bénéficier de la protection consulaire comme n’importe quel citoyen français ! Je rappelle qu’on lui a retiré son passeport français hier soir cela est suffisant pour que l’ambassade intervienne !

Nous demandons également à ce que l’ambassade de France s’enquiert de la réalité du statut juridique de Moussa Wagué au Mali. L’ambassade est informée depuis une semaine. On aimerait savoir ce qu’il en est depuis ». 

 

Non droit et non-dits

 Nos questions en ce sens à l’ambassade de France au Mali  sont restées jusqu’à maintenant sans réponse. Nous ne savons donc pas ce que l’ambassade de France a reçu comme information de la part de l’Etat et des autorités du Mali. C’est pourquoi la demande de clarification est importante parce qu’elle oblige l’ambassade à se renseigner sur le sort réservé à un Français au Mali et donc à demander des explications aux autorités maliennes. On ne peut sans fondement interdire la libre circulation des individus, droit reconnu par la Déclaration Universelle des droits de l’Homme. Le Mali a ratifié cette convention en 1985 et nous savons les magistrats maliens tout autant respectueux du droit que ceux de France ou d’ailleurs ! Maintenant, le manque de transparence n’est pas de nature à nous rassurer dans notre quête de sécurité juridique. Nous ne pouvons que souhaiter que la situation s’arrange, que Moussa Wagué retrouve sa liberté de circuler et d’entreprendre et que sa maison de disque Keyzit  trouve un terrain d’entente avec les artistes Toumani et Sidiki Diabaté.

PEACE LOVE AND HAVING FUN

 

Maître Maati, Makha Diabira et Virginie Legourd 

 

1 aout 2018

 

Le 7 août 2018

Nous nous réjouissons d’apprendre que Moussa Wagué est rentré en France ce jour. Nous ne pouvons que souhaiter que les différents qui l’opposent encore aujourd’hui à Sidiki Diabaté, artiste talentueux dont les morceaux et feat sont de vrais tubes,  trouvent rapidement une issue sereine qui satisfassent les intérêts de tous. Après tout, ce qui compte c’est que les artistes puissent vivre de leur art et faire rayonner leur musique à travers le monde.

PEACE LOVE AND HAVING FUN

 

Makha Diabira et Virginie Legourd