Endométriose : Aynoa réunit toutes les femmes du monde contre la maladie

©Guillaume Saix
©Guillaume Saix

Aynoa et Marianne Bp partagent un projet vidéo international pour que la voix des femmes atteintes d’endométriose se fasse entendre à travers le monde. We are 200 million- Code Name Endometriosis- On est ensemble, plus forts, tous et toutes contre cette maladie. Rebellissime soutient et s’associe à cette magnifique  mobilisation internationale.  

En 2017, Aynoa chante et clip son morceau Prières. Cette balade pleine d’émotion témoigne déjà de l’engagement de l’artiste qui souffre de la maladie. Déjà bien entourée par la vidéaste Marianne Bp et toute leur équipe, elle met son art au service du combat contre l’endométriose. Alors qu’elle a été découverte en 1860, la maladie reste encore énigmatique, tabou. C’est « une maladie multifactorielle, résultant de l’action combinée de facteurs génétiques et environnementaux, et de facteurs liés aux menstruations ». Elle se caractérise par la présence de tissu semblable à l’endomètre en dehors de la cavité utérine.  On ne connaît pas bien précisément les causes bien. Grâce aux actions des associations, notamment l’Endomarch qui aura lieu cette année le 28 mars, on en parle plus. Des millions de femmes (200 millions à travers le monde, dont plus de 4 millions en France) mettent un mot sur leurs maux. Le projet vidéo international d’Aynoa et Marianne Bp vise à leur donner la parole à toutes. Libérer la parole, s’inspirer des expériences des unes et des autres, prendre conscience de avancées et des lacunes dans chaque pays… On est ensemble ! Interview…

Rebellissime : En 2017, vous sortez un Ep, le morceau Prières pour lutter contre l’endométriose, quel bilan faites vous aujourd’hui de cette lutte ?

Aynoa : « Prières est une chanson cadeau écrite en 2007 pour soutenir une amie ayant vécu un combat de 6 ou 7 années de pma, en vain. A l’époque nous ne savions pas ce qu’était l’endométriose. Ce n’est qu’en 2014 que j’apprends son existence après mon diagnostic avec 19 ans de retard… Ironie tragique du sort, cette amie prend connaissance qu’elle est atteinte d’endométriose en février 2020 à l’âge de 45ans… C’est pour dire.

Plus que de lutter, je parlerais d’agir. L’action permet de garder l’espoir, le positivisme et le rayonnement en soi. Les ventes de l’Ep et de la chanson ont permis tout d’abord de reverser des dons à l’association Endomind que je soutiens.

Grâce à cette chanson, et bien d’autres par la suite, j’ai pu sensibiliser à l’endométriose lors des concerts, nous avons chanté aux 10 ans du centre expert endométriose de l’hôpital St Joseph Paris, à Monaco, dans le cadre de la Pas Si Sage Party où Endomind était présente.

Il n’y a rien de plus magique que d’avoir des gens du public venir vous voir en vous disant : « Je crois que j’ai cette maladie, merci d’en avoir parlé, je vais aller consulter ».

Depuis 2017, il y a eu des avancées colossales pour l’endométriose, associations, patientes, célébrités, médecins se sont mobilisés pour mettre en lumière l’endométriose et améliorer sa prise en charge. Les differents ministères de la santé se sont impliqués.

Il y a eu par exemple la mise à jour des recommandations pour la prise en charge de l’endométriose, un plan endométriose afin de sensibiliser dans les infirmeries scolaires, auprès des professeurs, la création de Compare, un projet de recherche autour des maladies chroniques et notamment de l’endométriose. Cette année, un appel à projet de l’ARS Île de France soutenu par Endomind pour la constitution de filières de soins sur l’ensemble du territoire pour améliorer le délai de diagnostic et proposer un parcours de soin pour éviter les errances. Il y a eu également la naissance de l’Endorun en 2018, initié par Imany. La prochaine marche mondiale à Paris est le 28 mars 2020, j’espère que vous viendrez nombreux ».

Rebellissime : Qu’est ce que l’endométriose ?

Aynoa : « C’est une maladie chronique, généralement récidivante, pouvant être très invalidante et qui touche 1 à 2 femmes sur 10. L’endomètre est le tissu qui recouvre l’utérus. Pendant le cycle, il va gonfler en vu d’une potentielle fécondation. Si elle n’a pas lieu, il va se dissoudre et saigner. Ce sont les règles. Seulement de petites cellules de l’endomètre vont migrer par les trompes hors de l’utérus. Le corps de la femme atteinte d’endométriose ne va pas éliminer ces cellules. Elles vont donc coloniser le corps, chaque mois elles vont réagir exactement comme si elles étaient encore dans l’utérus, et saigner. Ne pouvant être évacuer par le vagin, ces hémorragies vont provoquer des lésions, des adhérences entre les organes, des kystes, des nodules. Cette colonisation pourra toucher ainsi tout le corps, les organes génitaux, le péritoine (Membrane qui tapisse les parois intérieures de l’abdomen et recouvre les organes qui y sont contenu), la vessie, l’appareil digestif, pulmonaire, thoracique, le diaphragme et plus rarement le canal lacrymonasal, le cerveau… Il y a autant d’endométrioses que de femmes atteintes, et même des formes asymptomatiques et une endométriose interne à l’utérus : l’adénomyose ».

 

 

Aynoa nous présente son projet vidéo international :

We are 200 million- Code Name Endometriosis-

 

Aynoa et Nathalie Clary
Aynoa et Nathalie Clary

 

Rebellissime: Votre projet est soutenu par Endomind, d’autres assos sont elles attendues ?

Aynoa : « Je remercie Nathaly Clary, Présidente d’Endomind, qui chaque fois est partante pour soutenir les projets les plus fous.

Nous avons ensuite été rejoint par L’association Mon Endométriose Ma Souffrance (Mems Métropole et Réunion), Endometriosis association of Ireland, Associaçao Portuguesa de Apoio a Mulheres com Endometriose, Endo Sisters East Africa Foundation, Endometriose Québec, EndofiGabon, Fundacja Pokonac, Endometrioza etc… ainsi que de nombreux groupes Facebook : Vivir con endometriosis, endometrioza i ja, mieux vivre avec l’endométriose, etc... »

 

©Nathalie Clary
©Nathalie Clary

Rebellissime : Pourquoi la prise de parole mais aussi faire entendre cette parole est important?

Aynoa : « L’endométriose fut longtemps appelée la maladie du silence, car tombée au fond d’un puit. Aussi, la prise de conscience et les avancées sont dues à la parole ! La méchanceté continue de régner puisqu’une fois que les patientes se sont mises à parler, puis les médias, puis tout le monde, pour qu’enfin elle puisse sortir de l’ombre, on a entendu des phrases atroces comme    « C’est à la mode ! »

Un gynécologue m’a même dit une fois, « Oh maintenant, j’ai tout un tas de petites nénéttes qui viennent consulter pour savoir si elles ont une endométriose » Comme si cela n’était pas normal de consulter lorsqu’on souffrait, comme si cela n’était pas son métier !

Donc avant on devait fermer nos gueules parce que c’était normal, et maintenant on doit aussi la fermer parce qu’on en parle trop. Vous imaginez ?

Pourquoi continuer de parler ? Pour diagnostiquer. Pour dépister. Pour continuer de progresser car il y a tant à faire encore.

L’endométriose n’est pas étudiée lors des études de médecine. Les « traitements » ne sont pas remboursés, il n’y a pas de fonds pour la recherche !

Il faudra encore mettre à jour les recommandations de la Haute Autorité de Santé qui comporte des erreurs grossières : elle écrit que ce n’est pas une maladie récidivante, que le dépistage n’est pas nécessaire, et que les femmes qui souffrent ont de l’hyperalgésie (douleur anormalement amplifiée suscitée par un stimulus douloureux).

Le dépistage est capital, certaines ont leur règle dés 9 ans ».

Aynoa et Noémie de Lattre. "On nous a dit qu'c'était normal"
Aynoa et Noémie de Lattre. « On nous a dit qu’c’était normal »

Rebellisime : Votre poème lu avec l’actrice Noémie de Lattre est émouvant et montre aussi la colère qui peut envahie certaines femmes, pourquoi cette colère est légitime ?

Aynoa : « Je remercie tellement Noémie pour son soutien à notre cause, c’est une femme et une humaniste incroyable et c’est une chance de l’avoir à nos côtés.

 

Ce poème est dénué de colère. Il décrit simplement des faits et montre que l’on continuera de marcher pour faire avancer les choses, mes textes sont toujours porteurs d’espoir.

Après, à l’annonce d’un diagnostic qui en moyenne est de 7ans, après des années d’agonies méprisées, qui continuent après le diagnostic sans soins ni accompagnement aucun, on revoit sa vie jonchée d’injustices, défiler… il peut y avoir un cocktail d’émotions à gérer, le désespoir, la colère qui seront dépassés et transformées en force justement, au travers de l’acceptation et des actions positives que nous menons pour changer les choses et pour que nos petites filles ne les vivent pas.

Pour notre projet vidéo, nous recevons des témoignages plus sublimes les uns que les autres sur l’impact notamment social, professionnel, intime qu’a eu la maladie dans leur vie. Il y a aussi beaucoup de messages d’espoir positifs. Nous avons hâte de le partager. Vous pouvez encore nous écrire à projetendoaynoa.bp@gmail.com« 

Rebellissime : Qu’attendez vous des pouvoirs publics et du corps médical ?

Aynoa : « Les pouvoirs publics et le corps médical c’est nous, nous avançons ensemble et nous sommes toutes et tous concernés par l’endométriose.

Il faut s’inspirer des uns des autres.

L’Italie envisage d’adopter un congé pour les femmes souffrant de règles douloureuses, et met en place un numéro d’urgence, car nous rappelons que les douleurs peuvent mettre au supplice tant elles sont violentes. Le gouvernement australien s’est excusé publiquement de n’avoir pas  à ce jour dépensé 1 seul euro pour la recherche, tout comme nous, et débloque officiellement 4,7 millions de dollars pour le premier plan d’action pour l’endométriose. L’Ecosse vient de voter la gratuité des protections hygiéniques.

Nous devons former nos médeçins, demain chaque gynécologue, gastro entérologue, pneumologue, radiologue…  devra pouvoir connaître la maladie aussi bien que les associations et les patientes.

Notre projet vidéo international va dans ce sens : nous sommes ensemble ! »

Rebellissime : Comment la musique, votre art vous aident contre cette maladie ?

Aynoa : « Exercer son art, c’est offrir son âme, sur papier, sur toile, sur buvard, au travers de 2 , 3 notes, ou d’un souffle. Aussi c’est tout le cœur qui se déverse, j’appelle ma musique de la pop intime, car elle me permet d’évacuer, de me guérir, c’est salvateur, tout comme l’engagement pour la cause. Ce qui est merveilleux, c’est que la personne qui reçoit l’art, qui regarde la toile, qui lit le texte, qui écoute la musique, voyage autant que le créateur, c’est un échange vibrant et je crois que pour tout maux, il est précieux.

Après je ne vous cache pas que la maladie m’a stoppée, je ne pouvais plus me produire, trop épuisée en sortant de scène.

Chanter mobilise le diaphragme et le ventre ! Aussi chanter m’était devenu impossible.

J’ai repris la création et c’est déjà merveilleux. Mon 2eme poème J’ai un volcan dans mon ventre sera mis en musique pour les crédits de la vidéo ».

Aynoa et Imany lors de l'Endorun 2018
Aynoa et Imany lors de l’Endorun 2018

Question Rebellissime : Qui  est votre rebelle préféré et pourquoi ?

Aynoa : « Imany, la marraine d’Endomind qui a tant fait pour nous toutes.

Et puis vous Virginie et le magazine Rebellissime qui accepte à nouveau de nous soutenir pour aider la sensibilisation à l’endométriose ! Nous sommes super touchées ».

Non, là c’est nous qui sommes touchée Aynoa ! 😉

 

Aynoa et Virginie Legourd

Le 2 mars 2020