SAHARA
Un dessin animé qui arrive à vous faire aimer les serpents et donne de la fraîcheur au désert du Sahara par son humour et sa modernité… La Rebellissime team a assisté à une avant-première et vous livre son avis.
Déjà, on a bien rit, les deux enfants de 11 ans, le papa et la maman aussi. On a même vu les pieds des juniors s’animer aux rythmes de la bande son. Bande son qui mélange sympathiquement les genres. Pour passer un bon moment en famille, n’hésitez pas ! Le film sort mercredi 1er février. Voilà, comme ça c’est dit, c’est fait ! Sahara, c’est parfait pour commencer les vacances de février, ou un week-end. Le film peut rassembler toutes les générations… Même les plus petits qui, d’après ceux que l’on a vu dans la salle n’ont même pas eu peur des serpents. Parce que ces serpents-là, c’est différent…
Road movie dans le désert
Alors le pitch, comme dirait l’autre. 1h30 de sable à perte de vue et de soleil brûlant. Bienvenue dans le désert, cet univers implacable dominé par la loi du plus fort. Les plus forts, Ajar le serpent et son pote scorpion Pitt sont loin de l’être… Lassés d’être les souffre-douleurs de leur communauté de crève-la-faim, ils décident de tenter leur chance dans l’Oasis voisine, ce monde de volupté où vit la haute bourgeoisie du désert, strictement interdite à la racaille des sables. C’est là que vit Eva, la belle serpent, dont Ajar s’est épris au premier regard. C’est aussi là que leurs ennuis commencent.
C’est surtout là que débutent pour eux de folles aventures qui les amèneront à traverser le désert à la poursuite de l’amour et la découverte d’eux-mêmes… Pierre Coré, le réalisateur ne cache pas qu’il est bon spectateur de road movies. Il a aussi réalisé des courts-métrages de ce style The Little Cat is dead, par exemple. Sahara n’échappe pas aux règles du genre : des personnages dont la trajectoire n’est jamais celle prévue au départ, des rencontres révélatrices et au final on s’aperçoit que ce n’est pas l’objectif mais le chemin parcouru qui compte.
Langue de vipère… Moi ? Non !
J’ai bien aimé les serpents qui font aimer les serpents alors que d’habitude, ces reptiles me glacent le sang ! Sans souffrir d’ophiophobie ou d’ophidophobie, je trouve ça beurrrrrk, dégueulasse, répugnant, terrorisant. Même si je sais pour Bida, le boa ou python, selon les versions, qui protège le Ouagadou et la famille régnante des Soninkés en échange, chaque année, d’une belle jeune fille. Jusqu’au jour où, l’amour prend le dessus et Mamadou Sakho tue le serpent pour sauver sa bien-aimée Sya. De sa mort découlera le déclin de l’Empire. Comment ça les contes de fées finissent mal ?
J’ai bien aimé qu’il n’y ai pas de cliché sur le désert, sa population… blah, blah, blah, parce que c’est un film français et que par les temps qui courent on ne sait plus à qui on sert la main. On peut sans le savoir, réchauffer un serpent dans son sein…
J’ai bien aimé que cela se passe justement dans le désert, au moins, il fait chaud ça change de la météo ! D’ailleurs pour la petite histoire, le réalisateur Pierre Coré, qui écrit aussi des contes pour enfants, avait imaginé un premier projet sur la banquise avec des manchots. C’était il y a six ans et avec toute la déferlante glaciale des Happy Feet, Rois de la Glisse, et Reine des Neiges, le choix du désert s’avère judicieux. Comme avec Vaiana, on prend un peu de chaleur et de soleil et c’est déjà beaucoup.
J’ai bien aimé le relou de service, Gary, le boulet… Ce fils à papa désœuvré et accroc au pollen fera bien rire les petits par son côté «j’veux faire l’intelligent et frimer sur les autres alors qu’il passe pour un débile» selon notre fils Gaye. Il fera bien rire aussi les parents et leur rappellera sans doute une vieille connaissance, un pote ou un cousin, un enfant seul… Qu’au fond on aime bien !
Bien ficelé !
Pierre Coré, le réalisateur, auteur et producteur signe ici son premier long métrage, aux côtés de Nessim Debbiche et Stéphane Kazandjian. Cette coproduction franco-canadienne, a été fabriquée entre la Station Animation en France (Paris et Arles) et Mikros Montréal au Canada.
Gros casting vocal : avec les voix d’Omar Sy (Ajar), Louane Emera (Eva), Franck Gastambide (Pitt), Vincent Lacoste (Gary), Jean Dujardin (Georges), Mathilde Seigner (Rita), Marie-Claude PietragallaPietragalla (Pietra), Ramzy Bédia (Chef-Chef), Clovis Cornillac (le vert luisant), Grand Corps Malade(Omar), Roshdy Zem (Saladin), Sabrina Ouazani (Alexandra), Jonathan Lambert (Michel), Michael Youn (Poisson des sables)… Nous n’avons pas reconnu tout le monde… sur le coup, si ce n’est que l’on se sent entouré de voix familières. Du coup, les personnages sont attachants alors qu’ils font plutôt partie des bébêtes qu’on aime pas. Comme quoi, il ne faut pas se fier aux apparences et apprendre à se connaître… à vivre ensemble ! Pour les besoins du film, lorsqu’un scorpion pique, on ne meurt pas, on dort ! Les serpents n’ont plus de crochets, ni d’écailles remplacés par de jolis tatouages. Ils ne se déplacent pas en filant mais se dandinent avec grâce le torse relevé.
Selon notre fils Gaye : «C’était drôle, la musique est bien, il y a même une battle !» Ah !… la fameuse scène entre du combat de danse entre deux serpents filles Eva et Pietra… Il semble qu’il s’agisse d’un véritable défi technique relevé par l’équipe. Imaginez la mise en scène : trouver des références puis les interpréter. Faire danser et chorégraphier deux personnages qui n’ont ni bras, ni pieds, ni bassin… Vous verrez, mais nous, nous disons Bravo ! Et merci pour le clin d’œil aux battles de hip-hop. (6 personnes ont travaillé deux mois à plein temps pour cette scène!)
Ajar et Eva
Étymologiquement, si je ne me trompe Ajar, est plutôt féminin. C’est un prénom dérivé d’Hagar, en Hébreu, celle qui a migré. Le prénom fait référence à la servante égyptienne de Sarah. La femme d’Abraham, se croyant stérile, demande à Hagar d’assurer une descendance à son mari. Le prénom est très peu donné en France. Pourtant les Ajar sont réputées affectueuses, dévouées et protectrices. Pourquoi un prénom féminin pour un héros masculin ? Je ne sais pas, mais cela lui va très bien et n’enlève rien au charme d’Ajar, le jeune cobra. Qui sait, en 2017 ce prénom inspirera peut-être de futurs parents ?
Quant à Eva, la couleuvre verte … En général, s’il y a serpent, référence à Adam et Eve, ça craint un peu pour les nanas. Parce qu’en gros tout est de leur faute… C’est un peu le serpent qui se mort la queue (ça tourne en rond) et on revient toujours à la culpabilité des femmes, sources de tous les maux de la terre. Ce qui explique sans doute qu’on en retrouve autant à la tête des entreprises, des gouvernements et des armées… Pensez donc ! Avec des salaires 20% moins chers que ceux des hommes, on ferait des économies ! Mais elles ont croqué la pomme… grave erreur ! Manquerait plus qu’elles ne rêvent de serpent ces filles lubriques ! Comme l’a dit l’écrivain Robert Sabatier «Adam et Eve furent punis d’être végétariens. Ils auraient dû manger le serpent»… On ‘en serait pas là, c’est vrai !
Selon notre fils Gaye : « j’ai bien aimé le film, c’était drôle, même si c’est une histoire d’amour. Ajar va tout faire pour retrouver une fille qu’il n’a vu qu’une fois. Il va risquer sa vie. J’ai bien aimé que l’amour et l’amitié réunissent des animaux qui n’avaient rien à voir entre eux ! »
Tour du monde des expressions de circonstances
«Le serpent ne pique pas l’aigle» : expression asiatique signifiant qu’une personne est tellement haut placée que personne ne peut l’atteindre.
«Qui a été mordu par un serpent évite les hautes herbes»: proverbe chinois
«Ne brandis pas dans l’air le serpent que tu as tué, les autres serpents te guettent»: proverbe Bantou
«Serpent qui change de peau est toujours serpent» : proverbe Martiniquais
«Le serpent change de peau, non de nature» : proverbe persan
Et la morale dans tout ça ?
Y’a des serpents et des scorpions, plutôt du genre anti-héros d’habitude, mais cela reste un film drôle et familial, donc avec une morale de l’histoire. A travers des personnages exploités dans des rôles de composition puisqu’ils dévoilent leurs doutes, leur fragilité et leur humour, Pierre Coré aborde des questions de société difficiles. Le racisme, le classisme et l’exclusion de manière générale en prennent un bon coup dans la figure. Et bim !
Et les enfants ne sont pas dupes. Pas du genre à avaler des couleuvres ! Selon notre fils Gaye : «J’ai bien aimé aussi l’histoire d’amitié entre Ajar et Pitt. C’est drôle même si l’histoire entre serpents bleus, les sableux et les serpents verts, les privilégiés de l’oasis font penser aux différences entre riches et pauvres mais aussi au racisme». Au-delà du road movie, Sahara est aussi un conte sur les différences de classe et les préjugés…
Allez-y !
La Rebellissime team 29 janvier 2017